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DAC - le portail d'information de l'association Développer Autrement le Congo (DAC).

05 Jan

LA REUSSITE ECONOMIQUE DU CONGO-BRAZZAVILLE, DEPEND-ELLE DE SON ADMISSION AU PPTE ?

Publié par BERI



Pourquoi SASSOU NGUESSO s’est -il affiché moins loquace ce 31 décembre 2009 en prononçant ses voeux de l’année 2010 ? DENIS SASSOU NGUESSO a affiché un optimisme enfoui en ces termes : « Que sera 2010 ? Si, au cours des douze prochains mois, notre pays maintient la même stabilité, soutient le même effort, préserve sa cohésion, 2010, première année de la mise en oeuvre du "Chemin d’Avenir, marquera une étape décisive de notre marche vers l’industrialisation et la modernisation du Congo. Ce défi est à notre portée, pourvu que la paix, la sécurité et la démocratie continuent d’être les principaux supports de notre action publique. Pourvu que partout dans le monde du travail, dans les administrations publiques, dans les entreprises, le dialogue social soit privilégié; qu’il soit partout la règle. » Les Congolais doivent-ils regarder l’année 2010 avec déploiement de magnificence ou l’ostentation de l’obtention du point de décision de l’initiative en faveur des Pays pauvres très endettés (PPTE) ? Il convient de s’interroger sur les avantages et les inconvénients de ce programme pour le Congo. Le programme appelé PPTE dont pourrait aspirer notre pays dans quelques jours ou dans quelques mois dépend d’un avis favorable de la FMI et de la Banque Mondiale. Cet avis dépend des réformes structurelles entreprises au Congo. Ces réformes ne sont pas seulement économiques et financières ; elles ont également un contenu de bonne gouvernance. Les bailleurs de fonds sont actuellement très exigeants et ne souhaitent pas que les fonds ristournés soient détournés par les gouvernants en place. Pour y parvenir, SASSOU NGUESSO et son gouvernement ont dépensé des centaines de millions de F CFA pour monnayer les services des sociétés de Lobbying basées à Paris et à Washington.

Il y a lieu de chercher à comprendre les motivations cachées de cette initiative de décision dite PPTE.

Le PPTE sera-t-il la panacée pour sortir les Congolais de la pauvreté ?                                          
Avant de répondre à cette interrogation, les Congolais doivent d’abord faire une introspection du passé et se demander : Quels sont les projets palpables réalisés sur l’ensemble du territoire de telle sorte que le Congo s’est retrouvé avec une dette de près de 4000 milliards de F CFA et qu’il ne peut remboursé ? Une fois que les Congolais auront fait cette introspection, nous pourrions examiner les avantages et les inconvénients de ce programme pour le Congo. En effet, de nombreux pays ont déjà obtenu le programme PPTE depuis plusieurs années mais restent toujours au point de départ de leur développement pour ne pas dire sous-développement.
Les initiés en économie savent que l’admission au PPTE conduit à l’annulation d’une partie ou de la totalité de la dette extérieure du pays débiteur. Mais le pays débiteur a l’obligation de consacrer les ressources « ristournées » aux projets de développement définis de commun accord avec les créanciers. Du point de vue des créanciers, la remise de la dette ne leur coûterait rien car n’importe comment cette dette ne sera jamais honorée par le Congo.

Les bailleurs de fonds auront bonne conscience et leur image sera auréolée. Ils ne décaisseront aucune ressource additionnelle. Si le PPTE aboutit à une annulation partielle ou totale de la dette extérieure du Congo (4000 milliards F CFA soit 6 milliards d’euros), il sied de reconnaître que l’Etat congolais ne va nullement s’enrichir, car ces ressources seront virtuelles dans la mesure où le Congo devra consacrer cette somme aux différents projets de développement : construction ou amélioration des infrastructures de base, éducation, santé…). Le Congo devra réaffecter de son propre budget annuel avec la contrainte de le faire du fait de l’engagement pris devant les bailleurs de fonds. Ces derniers à travers le FMI, La Banque Mondiale (BM) ou la BAD (Banque Africaine de Développement) auront le pouvoir et le droit de surveiller l’exécution de ces engagements. Les Congolais doivent savoir que le PPTE ne procurera pas de ressources additionnelles massives pour le pays. Pour le Congo, le PPTE correspondra plutôt à une réaffectation de ses propres ressources budgétaires pour des actions d’éradication de la pauvreté, en particulier, dans les domaines des infrastructures de base, l’éducation et la santé. Ces réaffectations budgétaires s’opèrent en fonction du contenu du document cadre de réduction de la pauvreté (DSRP), un document rédigé par le gouvernement congolais avec une participation de la société civile et du secteur privé. Le DRSP serait axé sur la poursuite des objectifs d’éradication de la pauvreté défini par le FMI et la Banque Mondiale.

 Pourquoi le PPTE au Congo-Brazzaville ?

Pour le Congo, le PPTE ne sera autre chose que la traduction linéaire de l’échec patent et cuisant des programmes économiques et politiques depuis près de 30 ans. Qu’on ne s’y trompe pas. Comment un pays riche en pétrole, en bois et en divers minerais et ayant moins de 4 millions d’habitants, que certaines langues auraient appelé « le Koweït d’Afrique », devra-t-il trouver son salut par le PPTE ? Il faut reconnaître que le Congo depuis 30 ans a toujours été mauvais élève en matière de planification économique. A cela, il faut ajouter la corruption immuable et exponentielle et encore le laxisme des gouvernants. Le PPTE du Congo sera un programme triennal financé par la facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance du FMI. Ce serait une bouffée d’oxygène pour le Congo qui pour l’année 2010 affiche un budget de 2800 milliards et 900 millions de F CFA. La Banque mondiale et d’autres partenaires pourront apporter des ressources complémentaires. La dette privée, celle du club de Londres sera exclue du PPTTE.
L’admission du Congo au PPTE imposera au Congo des conditionnalités de bonne gouvernance (la paix sociale et le respect de la démocratie) et des réformes structurelles dont la cadence par le gouvernement déterminera l’horizon de franchissement du point

d’achèvement. Plus lentement, SASSOU NGUESSO entreprendra les réformes, plus éloignée sera l’atteinte du point d’achèvement. Ces réformes porteront sur le secteur du pétrole (dissolution de la Cotrade, audit de la SNPC et la Coraf…), de l’énergie (audit et privatisation de la SNE et de la SNDE), du secteur du bois (Audit des permis d’exploitation et des recettes versées au Trésor Public), la privatisation ou la mise en concession de certaines entreprises d’Etat (le Port Maritime de Pointe-Noire, l’ATC, le CFCO, les aéroports internationaux du pays), et une maîtrise des effectifs de la fonction publique. De façon concrète, une loi contre l’enrichissement illicite, une commission de lutte contre la corruption et des commissions d’attribution et de surveillance des marchés publics ont été installées de façon à donner confiance aux opérateurs privés (Voir l’article sur l’utopie d’une commission : http://berijc.over-blog.com/article-l-utopie-d-une-commission-39352233.html). Toutes les entreprises d’Etat qui n’exercent pas un rôle régalien devront être privatisées. Les privatisations susciteront un secteur privé dynamique, opérationnel et créateur d’emplois. La création des emplois pourrait résoudre en partie le chômage chronique et galopant des jeunes. Au niveau des réformes structurelles qui relèvent du domaine réservé de la Banque Mondiale (BM), l’augmentation de la masse salariale de l’Etat (militaires et fonctionnaires civils) pourrait constituer un blocage du programme PPTE. Pour ce qui est de la masse salariale, il atteint aujourd’hui un seuil de 0,1% des recettes fiscales propres alors que la norme souscrite pour le Congo au niveau de la CEMAC prévoit un seuil de -5,1% (année 2007). L’admission au PPTE imposera la maîtrise de la masse salariale. Or l’atteinte du point de décision du PPTE fera naître de grands espoirs relatifs à l’augmentation des salaires. Les bailleurs de fonds ayant fait une concession sur la dette ; ils n’admettront pas que l’abandon des créances puisse servir à financer les augmentations des salaires des fonctionnaires Congolais. C’est pourquoi la seule issue pour augmenter les salaires ne proviendrait que des économies que SASSOU NGUESSO devra réaliser grâce à une parfaite maîtrise des recettes fiscales et para-fiscales et à un audit rigoureux de la fonction publique qui permettrait de sortir les agents et les retraités fictifs et pourquoi pas profiter des nouvelles technologies pour décompresser une fonction publique pléthorique et hideuse. Toute autre tentative d’augmenter la masse salariale entravera le programme et entraînerait de facto un éloignement du point d’achèvement. De ce point de vue, on peut aisément comprendre pourquoi SASSOU NGUESSO demande aux Congolais d’être patients et de ne pas céder aux exigences inconsidérées.

 Les avantages du PPTE pour les Congolais


Le PPTE présentera toutefois des avantages pour le Congo car il permettra de disposer de ressources dont la bonne utilisation pourrait contribuer à la réduction de la pauvreté même si le niveau de ressources n’est pas celui qui est espéré. Le FMI, la BM et la BAD seront tenus de surveiller l’exécution du budget du Congo et l’utilisation des ressources, qu’elles soient propres ou provenant de la dette. Le Congo devra mettre définitivement un terme aux prêts gagés sur le pétrole. Selon le FMI, le Congo aurait contracté 75% des emprunts entre 1995 et 2000 et ces emprunts étaient gagés sur le pétrole. Le pays consacre chaque année 37% du budget de l’Etat à rembourser une dette dont peu de Congolais ont vu la couleur. Mais comment les prêteurs pouvaient-ils faire confiance à un Etat surendetté qui pourrait ne pas rembourser ? La sécurité pour les prêteurs est l’emprunt gagé sur le pétrole. Le PPTE induira une discipline budgétaire accrue. Le Congo devra ainsi renouer avec un cycle budgétaire normal. Ce cycle comportera une préparation du budget de juin à août, la présentation de la première mouture du budget au parlement en septembre ou octobre suivie d’un vote par le parlement avant novembre ou décembre. C’est ainsi que SASSOU NGUESSO a publié le décret d’application du budget 2010 le 30 décembre 2009 avec application à compter du 04 janvier 2010. Le PPTE ne tolérera pas l’exécution du budget par ordonnance. Un budget par ordonnance est le signe de la mauvaise gouvernance. Le PPTE comporte des inconvénients qu’il conviendrait de révéler aux syndicats, aux fonctionnaires et de manière générale aux Congolais pour tempérer les espérances suscitées par cette décision.

Les inconvénients du PPTE pour les Congolais
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Sans être exhaustifs, je peux citer quelques inconvénients du PPTE. Le Congo bénéficiera du « hasard moral ». Le hasard moral naît du fait que dorénavant, les bailleurs de fonds qui auront remis la dette, éprouveront une réticence à octroyer des prêts à notre pays à qui ils auront concédé une annulation partielle ou totale de dette. Les créanciers réfléchiront par deux fois avant de s’engager à nouveau dans une opération de crédit avec le Congo et ceci pour respecter l’adage qu’on ne prête qu’aux riches ! En effet, les pays PPTE sont estampillés « mauvais payeurs ». C’est pourquoi, pour éviter que ces pays ne retombent dans une trappe d’endettement, les bailleurs de fonds leur imposent après le point de décision, de s’endetter qu’à des taux dits concessionnels pendant une longue période. Ainsi, une fois sorti du PPTE, le pays bénéficiaire de l’initiative n’a plus accès au marché des capitaux pour financer son développement. De même, les bailleurs de fonds ayant consenti des allègements massifs de dette, dans le cadre du club de Paris, ne sont pas prêts à faire des dons ou des prêts à taux faible aux pays PPTE pour contribuer à leur développement. Les pays riches comptabilisent les effacements de dette dans leurs ressources consacrées aux pays pauvres. Ainsi, au moment où la plupart des pays riches connaît les effets dévastateurs de la crise financière internationale, le premier poste qui est réduit dans leur budget sera la part consacrée à l’aide publique au développement réduisant ainsi les dons espérés par les pays pauvres. Ce qui amenuiserait considérablement l’espoir des pays pauvres dans leur acheminement vers les objectifs de développement. De ce fait, si le Congo bénéficie de l’effacement de sa dette, dans le cadre de l’initiative PPTE ne devrait plus compter sur l’aide bilatérale.
En l’absence de l’aide internationale, il y a lieu de se demander, comment SASSOU NGUESSO entend-il moderniser et industrialiser le Congo ?

Si le Congo arrivait à sortir du PPTE, il n’aura ni accès au marché financier international, ni aux ressources de l’aide publique au développement des bilatéraux pour financer son développement. Il ne pourra compter sur l’assistance des institutions multilatérales que sont

le FMI, la BM et la BAD pour combler son gap de financement car les ressources propres seront toujours insuffisantes.
De ce fait, si le Congo réussissait à sortir du PPTE et qu’il y ait eu en même temps un tarissement des ressources propres, il continuera à vivre sous la coupe du FMI, de la BM et de BAD. Ainsi la sortie du tunnel sera longue. Rien ne sert d’afficher un optimisme béat.

Jean Claude BERI
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